Les.mistrals.gagnants

je suis un peu malade, depuis samedi, en fait. j'ai comme un début de grippe alors je reste dans mon lit presque toute la journée. éli m'apporte les cours le soir mais je ne la vois pas. c'est toujours un des garçons qui réceptionne, pour éviter que je ne la contamine. à chaque fois il y a un petit mot qui accompagne les cours. c'est tellement gentil. mais il faut que je guérisse. il faut que je sois soignée pour jeudi. je sais, c'est dans deux jours. mais il le faut parce que jeudi, lucas débarque. finalement, oui, il vient pendant ses vacances de la toussaint. papa et maman n'ont pas de vacances mais comme baptiste sera dispo, il pourra s'en occuper et comme ça, lulu sera là et ce sera bien. vendredi mes deux frères iront au parc astérix, avec un peu de chance je pourrai aller en cours et si je vais bien, l'après-midi, ce sera balade & chocolat chaud avec valentin, en amoureux. samedi, ce sera halloween et avec les garçons on s'est dit qu'il faudrait organiser un petit quelque chose pour lucas. alors on a essayé de prévenir ses copains de l'année dernière et on ira avec eux demander des bonbons. lucas sera heureux. il est resté en contact avec ses anciens amis mais, là, de les revoir et, en plus, en déguisement, oui, c'est sûr, il sera content. donc voila, c'est fou comme mes plans changent d'une semaine à l'autre, il y a toujours une modification, je ne prévois quasiment rien d'une semaine à l'autre parce que je sais que tout peut être annulé d'une seconde à l'autre.

et morgane dans tout ça? je ne l'oublie pas. je ne l'oublierai définitivement jamais. je ne peux pas. je croise ses parents à peu près une fois par semaine. ils me voient et c'est comme s'ils accéléraient le pas pour venir me saluer, me parler. je n'ose pas leur demander comment ils vont. je ne veux pas qu'ils me montrent leur chagrin. j'ai remarqué que, depuis le décès de leur fille, ils ont l'air rapprochés, comme des aimants. c'est étrange, mais, peu de temps avant sa mort, morgane me disait qu'elle craignait que ses parents ne divorcent. je suis allée sur sa tombe ce soir, après la fac, pour lui dire qu'elle ne s'inquiète pas, qu'ils sont beaux et biens tous les deux que la seule chose qui leur manque, c'est elle.
je ne veux pas l'oublier. et je ne peux pas. je pense à elle souvent. surtout quand le prof d'anat nous fait ce qui est censé être une blague sur quelqu'un qui se fait renverser par une voiture et qui explique les traumatismes craniens. et là, je me retiens pour ne pas m'effondrer de tout mon long sur la table. éli est souvent à côté de moi, je préfère que ce soit elle. parce qu'elle sait, parce qu'elle essaie de comprendre. alors que les autres, les nouveaux copains, ils ignorent le mois de janvier dernier, ils ne connaissent pas cette histoire du froid de la fin du mois. et je ne pense pas leur raconter.

lucas m'a appelée hier. j'étais sur mon vélo, je rentrai. il m'a dit "quand est-ce qu'on se voit émilieee?" alors, j'ai failli tomber parce que j'ai du lui répondre que je n'avais pas de vacances de la toussaint et que papa et maman ne prévoyaient peut-être pas de monter sur paris avant un petit moment. et j'ai senti sa voix baissée, il a dit "ah, d'accord" d'une voix si passive, si loin. ça m'a fait mal parce que je suis sûre que les changements de la rentrée ne sont pas faits pour un petit garçon de 10 ans, je suis sûre que ça l'a chamboulé cette histoire. et en même temps, il faut qu'il grandisse avec papa et maman, il faut qu'il découvre la campagne, et qu'il y vive et, comme ça, il pourra dire à ses copains, dans la cour de récré "ouééé, ce week-end, je suis allée à paris, voir ma soeur" et ce seront comme des moments magiques que nous vivront quand il viendra...

cela fait tellement longtemps que je ne suis pas venue ici. un mois et un jour. que dire?
après new-york et le cousin il y a eu paris et l'amoureux. je suis passée par des moments emplis d'émotions différentes les unes des autres. quand j'ai du quitter thom et la vue imprenable de l'appartement de manhattan, j'avoue, j'ai pleuré et j'avais comme une boule au ventre comme si j'avais voulu rester toute.ma.vie. et puis valentin est venu à l'aéroport et là tout a basculé. je l'ai vu, lui, tout bronzé, ses yeux noirs dans lesquels je me plonge ressortaient et je me suis dit que l'homme de ma vie était vachement beau. on a presque couru l'un vers l'autre (je dis presque parce que, en réalité, j'étais très fatiguée et que ma valise était lourde de souvenirs) il m'a embrassée, je l'ai embrassé, on s'est serrés l'un contre l'autre. j'ai souri en retrouvant l'appartement. lucas était encore là, il m'a sauté dans les bras en me racontant ces quelques jours loin de moi, il a fini par dire "tu sais, tu vas me manquer parce que je t'aime, moi" et là, encore toute émoustillée par mon voyage je lui ai dit que moi aussi mais qu'on n'allait jamais s'oublier. et baptiste est arrivé avec son macbook et ses histoires de journalisme. et lucas est parti avec son sac de voyage spiderman et son sourire d'enfant. j'ai changé de frère. et ça m'a fait, encore une fois, une drôle d'impression. ils sont tellement différents. 
alors voila, après ça, il y a eu ma rentrée et, maintenant, nous y sommes, je suis en médecine, en première année et je bosse comme une dingue. les garçons se débrouillent sans moi pour tout ce qui concerne l'appartement : baptiste va au courrier, valentin à la poubelle, une semaine mon frère fait la vaisselle et tout le ménage et mon copain fait la cuisine et met/débarasse la table. et vice-versa. c'est marrant, parfois, quand je travaille dans l'ancienne chambre des parents (qui est maintenant mon bureau, il est au bout de l'appartement, isolé) je les entends chuchoté derrière la porte "et là, tu crois qu'elle a fini? nan parce que c'est pour savoir si on mange maintenant ou après ou si je nettoie la salle de bain maintenant...." et j'attends un peu avant de dire "je vous entends, j'arrive, on va manger" et. c'est vraiment bien.